La schéma Goeckerman en détail

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Traduction de l’article du NCBI (National Center for Biotechnology Information, U.S. National Library of Medicine), 

The Goeckerman Regimen for the Treatment of Moderate to Severe Psoriasis, 2013 (Source : https://www.ncbi.nlm.nih.gov), « Articles du Journal of Visualized Experiments : JoVE, fournis ici avec la permission de MyJoVE Corporation ».

Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique, à médiation immunitaire, affectant environ 2 à 3 % de la population. La technique Goeckerman consiste en une exposition à la lumière ultraviolette B (UVB) et à l’application de goudron de houille brut (CCT). La thérapie Goeckerman est extrêmement efficace et relativement sûre pour le traitement du psoriasis et améliore la qualité de vie du patient. Dans l’article suivant, nous présentons notre protocole, de thérapie Goeckerman, utilisé spécifiquement à l’Université de Californie (San Francisco). Ce protocole détaille la préparation des fournitures, l’administration de la photothérapie et l’application de goudron topique. Ce protocole décrit également comment évaluer le patient quotidiennement, surveiller les éventuels effets indésirables (y compris le prurit et la brûlure) et ajuster le traitement en fonction de la réaction du patient au traitement. Malgré l’ancienneté de la thérapie, l’une des plus anciennes disponibles pour le psoriasis, aucune vidéo n’a été publiée, démontrant le processus en détail. La vidéo aurait été bénéfique pour les prestataires de soins qui veulent utiliser cette thérapie, pour les stagiaires qui veulent en savoir plus sur le processus, et pour les patients qui ont à choisir un traitement pour leur maladie cutanée (cf. à partir du lien vidéo ci-dessus)

Le psoriasis est une affection cutanée inflammatoire chronique à médiation immunitaire qui touche environ 2 à 3 % de la population (1) . Un tiers des patients souffrent de psoriasis généralisé, qui engendre des effets physiques et psychologiques débilitants. La technique Goeckerman, publiée pour la première fois en 1925 pour le traitement du psoriasis généralisé, consiste en l’exposition à la lumière ultraviolette B (UVB) et à l’application de goudron de houille brut (CCT)(2) .

Bien que les nouveaux agents internes, tels que les produits biologiques, aient amélioré le traitement du psoriasis, la thérapie Goeckerman demeure une option extrêmement efficace, tout en offrant une longue durée de rémission (3) (4). Dans une étude publiée et menée à l’UCSF, 100 % des patients sous traitement Goeckerman ont atteint le PASI75 (amélioration de 75 % de l’indice de gravité du psoriasis [PASI] en comparaison à avec la ligne de base) en 3 mois (5) . Parallèlement (bien que pas en confrontation directe), les patients utilisant les produits biologiques les plus puissants n’ont réalisé que 67-68 %  du PASI75 en 3 mois(6). La a technique Goeckerman a eu une évolution rapide et a été utilisée avec succès sur des patients atteints de psoriasis réfractaire, résistant aux traitements à la photothérapie ou à des médicaments internes (7). Le traitement Goeckerman présente également un profil de toxicité extrêmement sûr, sans effets secondaires internes, risques les plus graves associés aux autres traitements contre le psoriasis. En outre, la thérapie a démontré qu’elle avait un effet significativement positif sur la qualité de vie des patients atteints de psoriasis généralisé (8).

Durant longtemps, le traitement Goeckerman a été administré à des patients hospitalisés dans un établissement médical, à temps plein, jusqu’à ce qu’il soit guéri de son psoriasis. Cependant, en raison de s changements de réglementation dans le remboursement et la gestion des soins, les patients sont maintenant traités dans des établissements de jour pour une durée de 4 à 8 h par jour et ce, 5 jours par semaine, jusqu’à ce que leur maladie disparaisse. La thérapie Goeckerman avait été initialement formulée pour le traitement du psoriasis, mais une version modifiée a été récemment mise au point et utilisée avec succès pour le traitement d’autres affections cutanées, telles que l’eczéma. Le protocole décrit ci-après est utilisé à l’UCSF spécifiquement pour le psoriasis, mais de légers changements dans les procédures peuvent être effectués pour traiter eczéma, prurit généralisé, prurigo nodularis, pityriasis lichenoides chronique, érythrodermie et autres troubles cutanés connexes (9).

Bien que cette thérapie soit l’une des plus anciennes disponibles pour traiter le psoriasis, il n’y a pas de vidéo publiée démontrant le processus. Une vidéo pourrait avoir un écho certain, car elle pourrait être utilisée comme référence par les professionnels de santé (médecins de soins primaires généralistes et dermatologues), afin de permettre de comprendre le processus et de se sentir à l’aise pour recommander la thérapie. Une vidéo instrumentale démontrant le processus Goeckerman permettrait d’instruire les résidents et les étudiants en médecine, à ce jour non exposés au régime puisqu’il ne reste que peu d’institutions qui continuent de proposer ce type de thérapie intensive. Une vidéo est serait également bénéfique pour les patients susceptibles d’être intéressés par la thérapie Goeckerman.

Protocole :

1) Evaluations et préparation :

  1. Effectuer un bilan historique physique complet avant de commencer la thérapie. Ce bilan historique et ses documents associés contiennent des informations importantes telles que les médicaments actuels ou passés utilisés, les réactions aux thérapies antérieures expérimentées contre le psoriasis, toute réaction indésirable à la lumière du soleil ou à la photothérapie, la gravité du prurit et la qualité du sommeil.
  2. Mettre en place une salle de clinique avec tout le matériel nécessaire pour l’application cutanée de médicaments et d’occlusion [Voir la section Matériaux et Figure 1]. Placer également tout le matériel nécessaire dans la pièce : gants, film plastique, chaussettes et brosses / robes de chambre.
  3. Evaluer l’étendue et l’intensité de l’érythème (lésions de la peau) du patient avant de commencer la thérapie.
  4. Si le patient présente un érythème étendu ou intense, effectuer des soins d’apaisement (voir ci-dessous) jusqu’à ce que l’érythème soit significativement réduit. Si aucun érythème généralisé ou intense n’est observé, passer à l’étape “photothérapie + goudron”.

2) Apaiser / Calmer / Refroidir (si nécessaire) :

  1. Appliquer des corticostéroïdes topiques sur les zones touchées. Appliquer l’onguent Triamcinolone 0,1 % sur le tronc et les extrémités, Desonide 0,05 % crème ou onguent sur visage / aisselles / aine, et de l’huile Fluocinolone 0,01 % ou lotion Triamcinolone 0,1 % sur le cuir chevelu. Réserver la pommade Clobetasol 0,05 % aux zones où l’inflammation est la plus intense.
  2. Recouvrir les crèmes (médicaments topiques) avec un film plastique pour le tronc et les extrémités, des gants imperméables pour les mains, des bonnets de douche sous les chaussettes pour les pieds et un bonnet de douche pour le cuir chevelu.
  3. Poursuivre jusqu’à ce que l’érythème soit significativement réduit (de 3 à 14 jours).

3) Photothérapie et goudron :

  1. Après la période « d’apaisement », administrer la photothérapie quotidiennement, le matin, avant l’application du goudron de houille brut [Figure 2]. Les options de photothérapie comprennent les UVB à bande étroite (les plus couramment utilisés pour le psoriasis) ou les UVB à large bande (les plus couramment utilisés pour l’eczéma). Déterminer la dose initiale de photothérapie selon le type de peau de Fitzpatrick.
  2. Progressivement, augmenter les doses de photothérapie en fonction de la tolérance. Le schéma posologique et le calendrier doivent être individualisés en fonction de la réponse du patient à la photothérapie.
  3. Après la photothérapie, mettre 2 % de goudron de houille brut (CCT) dans de l’Aquaphor (baume réparateur) et appliquer localement sur les zones touchées [Figure 3]. Si le patient est atteint au cuir chevelu, mettre 20 % de détergents carboniques liquides (LCD) dans le Nutraderme (lotion) et appliquer.
  4. Au début, utiliser 2 % de CCT (dose la plus faible). Au cours des jours suivants de traitement, augmenter la dose de goudron, de 2 % à 5 % puis à 10 %, en fonction de la résistance et de la tolérance du patient, pour obtenir de meilleurs résultats.
  5. Pour les zones de psoriasis les plus épaisses, utiliser du goudron mélangé avec de l’acide salicylique (2 %; 5 % ; 10 % d’acide salicylique) pour aider à réduire l’écaillage et l’induration (durcissement, épaississement) des plaques. Utiliser initialement des préparations d’acide salicylique à 2 % avec 10 % de CCT, et augmenter le pourcentage d’acide salicylique, autant que toléré par le patient, durant les jours suivants. L’acide salicylique peut être contre-indiqué chez les diabétiques ou les ulcères gastriques.
  6. Recouvrir le goudron topique de la même manière que celle décrite à l’étape 2.2 pour la procédure «d’apaisement ».
  7. Laisser les médicaments topiques appliqués sur la peau pendant au moins 4 heures. Après cela, enlever le matériel d’occlusion et ôter le goudron dans la douche avec de l’huile minérale et du savon [Figure 4].
  8. Donner au patient 20 % de LCD dans de l’Aquaphor et 20 % de LCD dans du Nutraderm, à appliquer respectivement sur le corps et le cuir chevelu, à la maison.
  9. Les patients atteints d’eczéma ont tendance à avoir la peau sensible : donc au début, n’utiliser que 2 % de CCT pour ces patients. Etre prudent en augmentant progressivement jusqu’à 5 % de CCT. Ne pas utiliser de CCT à 10 % (ou un pourcentage de TCC ou CCT ? supérieur à 5 %) et ne pas utiliser de préparations contenant de l’acide salicylique.

4) Evaluation quotidienne :

  1. Chaque jour, observer et évaluer la peau du patient pour connaitre la réponse au traitement. En particulier concernant d’éventuelles sensations de brûlure, pouvant révéler une incapacité du patient à tolérer la lumière de la thérapie, ou des démangeaisons pouvant indiquer une irritation au goudron et/ou au plastique.
  2. Si un patient présente des signes de brûlure (sensation de brûlure, érythème croissant significatif, ou plus rarement augmentation de la démangeaison comme signe présomptif d’une brûlure imminente si la dosimétrie est augmentée), diminuer la dose de photothérapie ou ne pas administrer de photothérapie ce jour-là. Cela peut effectivement avoir été causé par une réaction phototoxique à la dose de lumière UV précédemment administrée.
  3. Il n’est pas rare que des patients aient des réponses anatomiques locales différentes, tout comme une tolérance à la photothérapie différente. Pour un traitement optimal, ajuster la dose de photothérapie selon les régions du corps et leurs réactions, ainsi qu’en fonction de la réponse du patient. Par exemple, si un patient éprouve une légère brûlure au tronc, traiter d’abord le corps entier avec une faible dose de photothérapie, puis couvrir le tronc et administrer une dose supplémentaire de photothérapie aux extrémités.

5) Planification de la sortie et programme d’entretien :

  1. Continuer la thérapie Goeckerman jusqu’à ce que le psoriasis ait disparu et que le patient soit prêt à sortir.
  2. Préparer pour les patients un programme d’entretien, qui peut inclure de la photothérapie ambulatoire et des médicaments topiques.
  3. Administrer une séance de photothérapie ambulatoire trois fois par semaine (au moins pendant le premier mois). Eventuellement, la fréquence sera diminuée graduellement : deux fois par semaine, puis une fois).
  4. Les médicaments pour le traitement ambulatoire comprennent : crème / onguent Triamcinolone pour le corps, à appliquer deux fois par jour, du Clobetasol pour les lésions récalcitrantes (si nécessaire) à appliquer deux fois par jour, 20 % de LCD mélangé à de l’Aquaphor pour le corps et 20 % de LCD mélangé à du Nutraderm pour le cuir chevelu.
  5. A la sortie du patient, planifier une visite médicale de suivi un mois plus tard, pour contrôler l’état de la maladie.

6) Résultats représentatifs :

Dans une étude réalisée au sein de notre Centre, à l’Université de Californie – San Francisco, la réponse PASI75 (une amélioration de 75 % de l’Indice de gravité de l’évaluation du psoriasis) a été atteinte chez 100 % des patients ayant reçu la thérapie Goeckerman (n = 25) sur une période de 3 mois (5). 24 patients sur 25 n’ont eu besoin que de 2 mois pour atteindre le PASI75, le patient restant ayant obtenu une réponse PASI75 à 3 mois.

Dans une autre étude, « Menter et al. », le régime Goeckerman a été administré à 300 patients. 100 % d’entre eux ont obtenu une disparition de leurs lésions (psoriasis) de 90 % ou plus. Le nombre moyen de jours de traitement pour ces patients a été seulement de 18 jours (4).

PAS75 (réponse après 3 mois de thérapie) est considéré comme l’outil  la référence ? standard pour évaluer l’efficacité d’une méthode de traitement contre le psoriasis. Bien que les produits biologiques soient la nouveauté en termes de traitement du psoriasis, leur efficacité rapportée n’est que de 67- 68 % des patients atteignant PASI75 à 3 mois (6). De plus, les produits biologiques sont associés à des risques internes potentiellement graves tels que : cancer interne, infections graves (tuberculose, coccidioidomycosis, histoplasmosis, etc) et risques cardiovasculaires (10) .

La thérapie Goeckerman évite ces risques graves tout en étant extrêmement efficace. L’utilisation conjointe de goudron topique et de photothérapie a un effet synergique. Le synergisme résulte du goudron, qui est un photo-sensibilisateur ; cela est démontré par des études présentant une plus grande efficacité de la thérapie combinée, par rapport à l’utilisation de la photothérapie seule (11).

Le traitement Goeckerman comprend habituellement 20 à 30 séances, entraînant une diminution du psoriasis plus ou moins importante. Bien que les résultats individuels varient, généralement après dix jours de traitement, nous observons que les patients ont une diminution du degré et de l’induration de leurs plaques. Après vingt jours, nous observons généralement l’aplatissement complet des plaques avec seulement la présence d’un érythème résiduel. Après 30 jours de traitement, nous observons une disparition complète des lésions de psoriasis, y compris l’érythème résiduel, avec seulement la subsistance éventuelle d’altérations post-inflammatoires de la pigmentation. Les patients éprouvent également une amélioration significative de leurs démangeaisons au cours de la thérapie. Si un patient a un psoriasis récalcitrant et ne montre pas d’amélioration de ses plaques dans le délai normal de traitement, la thérapie peut être prolongée si nécessaire. Par ailleurs, si un patient ne répond pas du tout par CCT et photothérapie topique, le diagnostic de psoriasis doit être réévalué et confirmé par une biopsie cutanée (en particulier pour exclure la mycosis fongoïde et le pityriasis rubra pilaris).

La thérapie Goeckerman procure l’une des durées de rémission les plus longues signalées dans les traitements du psoriasis. Après avoir terminé le traitement Goeckerman, la durée moyenne de la rémission peut être de 9,5 mois à plus d’un an (4) (12). Par conséquent, les patients peuvent s’attendre à maintenir une réaction positive à la thérapie durant environ un an. Cependant, le psoriasis étant une maladie chronique, la maladie tend à revenir au cours de la vie du patient, en particulier chez ceux qui cessent tout type de traitement, y compris les médicaments topiques et/ou la photothérapie ambulatoire. Les patients qui ont un psoriasis sévère et récurrent répéteront la thérapie Goeckerman au besoin, généralement sur une base annuelle (ou plus). Les hospitalisations répétées exigent souvent moins de jours de traitement pour obtenir une amélioration, car les patients ont tendance à devenir plus prompts à chercher de l’aide et ne développent pas non plus de résistance physiologique (tachyphylaxie) à la thérapie.

Ci-dessous, les photos d’un patient atteint de plaques de psoriasis grave, avant d’être traité avec la thérapie Goeckerman [Figure 5a]. Bien que son érythème doux soit toujours présent, il y a une diminution significative du degré et de l’induration de ses plaques après 4 semaines de traitement [Figure 5b]. Après avoir terminé un traitement complet, les patients peuvent s’attendre à une disparition complète de leurs lésions [Figures 6a et 6b].

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Figure 1 : les fournitures pour la thérapie Goeckerman. Les médicaments et les fournitures nécessaires pour l’application topique de goudron et de corticostéroïdes (dans le sens des aiguilles d’une montre) :

  • Milieu avant : Propionate de Clobetasol 0,05 % ;
  • Avant gauche : Fluocinolone Acetonide 0,01 % Huile ;
  • Gauche : Onguent hydrophile ;
  • Haut gauche : Lotion hydratante ;
  • Milieu gauche : Pot de 20 % ‘Liquide Carbonis Detergens’ dans de l’onguent Aquaphor (avec le bouchon ouvert) ;
  • Derrière (milieu) : film plastique pour recouvrir les médicaments topiques ;
  • Milieu, droite : Pot de goudron de houille brut 2 % en pétrolatum blanc (onguent avec le bouchon ouvert) ;
  • Droite : Pommade Triamcinolone 0,01 % ;
  • En haut à droite : Huile minérale pour nettoyer les médicaments topiques ;
  • Avant droit : 20 % lotion LCD.

Figure 2 : Station UVB à bande étroite.

La cellule à gauche est l’endroit où les patients reçoivent la photothérapie UVB.

A droite se trouve la station informatique reliée qui permet de tracer le dosage de la photothérapie, ainsi que et la réaction du patient à son adminitration.

Figure 3 : Application du goudron de houille brut.

L’infirmière applique du goudron de houille brut sur l’ensemble du corps avant de le recouvrir avec un film plastique.

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Figure 4 : Douche.

Pour laver les médicaments topiques, avec de l’huile minérale et du savon. Elle est équipée de tapis de sécurité pour empêcher tout glissement. Des poignées de sécurité sont également présentes et appréciées, en particulier des personnes âgées.

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Figure 5 : Réponse à la thérapie Goeckerman après quatre semaines.  .

Avant le traitement, le patient souffre de psoriasis de type « plaques épaisses» sur le haut du dos. Remarquez l’induration, l’épaisseur et l’érythème prononcé des plaques (A).

Après 4 semaines de traitement Goeckerman, le patient présente une diminution du degré et de l’induration. L’érythème résiduel est toujours présent (B).

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Figure 6 : Réponse à la thérapie Goeckerman après six semaines.

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Avant le traitement, le patient souffre d’un psoriasis sévère en plaques dans le dos (A).

Elimination des lésions de psoriasis après traitement complet Goeckerman (B).

Discussion :

Le protocole Goeckerman décrit ci-dessus est utilisé à UCSF et peut être modulé de multiples façons en fonction de la réponse du patient à la thérapie. Comme le patient est vu et examiné tous les jours, le protocole peut être individualisé afin d’assurer une efficacité maximale. Le traitement traditionnel de Goeckerman se limitait à l’utilisation de la photothérapie CCT et des UVB2. Cependant, le schéma a été modifié pour y inclure l’utilisation de corticostéroïdes topiques (et parfois d’autres médicaments topiques comme le Calcipotriène, l’Anthraline et le Tazarotène) (5). La prise de médicaments contre le psoriasis peut être poursuivie et peut également être bénéfique s en combinaison avec la thérapie Goeckerman, pour aider les patients à atteindre la rémission avec moins de jours de traitement. Si les patients ne répondent pas à la thérapie optimale Goeckerman, ils peuvent prendre des médicaments systémiques auxiliaires, tels que l’Acitrétine. Le prétraitement avec de l’Acitrétine (10-25 mg), préalablement au traitement Goeckerman, peut aider à diminuer le nombre de jours de traitement nécessaires pour éliminer les lésions de psoriasis avec CCT + photothérapie. Il convient de noter que l’Acitrétine peut rendre un patient photosensible et que la dose de photothérapie utilisée doit être diminuée lors de l’introduction de l’Acitrétine (13).

Les patients qui présentent un érythème diffus doivent être « apaisés » avant toute application de goudron topique ou toute photothérapie. Il est impératif de ne pas utiliser l’une de ces thérapies avant que l’érythème ait considérablement été réduit et que le patient ne montre pas de signe d’érythème intense de la peau. En outre, lorsqu’un patient éprouve une sensation de brûlure ou d’inconfort suite à l’exposition aux UV, il est important d’arrêter celle-ci jusqu’à ce que les symptômes du patient et toute inflammation visible aient été grandement réduits. Les UVB et/ou le goudron peuvent exacerber la maladie et aggraver l’inflammation, si l’on ne prend pas la précaution d’évaluer le patient pour s’assurer que l’inflammation n’est pas extrême.

L’application topique du goudron commence typiquement à 2 % de CCT. Cependant, si les patients n’ont pas de réactions indésirables au goudron, une préparation de goudron plus forte (5 % puis 10 %) peut être appliquée par voie topique. La CCT, combinée à l’acide salicylique, peut être utilisée si les plaques récalcitrantes présentent une mise à l’échelle significative et une induration qui n’atteint pas une réponse adéquate au goudron seul. 2 % d’acide salicylique est initialement utilisé avec 10 % de CCT, puis augmenté (à 5 % et 10 % avec 10 % de CCT) selon la tolérance. Les réactions indésirables graves au goudron ou à l’acide salicylique sont extrêmement rares. Si des réactions indésirables, généralement limitées à une irritation locale, se produisent, les patients passent à une teneur en goudron plus faible, ou alors le goudron est éloigné des zones sensibles. Les corticostéroïdes topiques sont utilisés pour diminuer l’inflammation cutanée. Si l’irritation de la peau est localisée, les stéroïdes topiques peuvent être appliqués à la zone localisée et le CCT peut être appliqué sur le reste des zones.

Concernant la sécurité, le traitement Goeckerman est excellent par rapport aux thérapies systémiques orales comme le Méthotrexate ou les produits biologiques. Comme on l’a noté précédemment, la thérapie Goeckerman ne provoque pas non plus les mêmes risques internes que les produits biologiques :  cancer, infections graves et augmentation du risque cardiovasculaire (10). Puisque les effets secondaires de la thérapie Goeckerman sont minimes, surtout par rapport à d’autres médicaments systémiques, ils peuvent être utilisés pour tous, y compris les personnes âgées, les enfants, les patients ayant des antécédents de cancer, les patients immunodéprimés et les patients souffrant d’autres comorbidités. Les effets secondaires plus doux mais plus fréquents de la thérapie Goeckerman sont la folliculite (inflammation au niveau pileux) et les réactions phototoxiques. Bien qu’il puisse y avoir une inquiétude au sujet des effets cancérogènes potentiels liés à l’application topique de goudron de houille, les études cliniques relatives aux patients traités sous CCT pendant une longue période n’ont pas montré un risque accru de cancer de la peau. Dans les multiples examens et études de suivi, il n’y a pas eu de constatation de risque accru de cancer associé à l’utilisation de CCT, comparativement aux stéroïdes topiques chez les patients atteints de psoriasis ou d’eczéma. (14) (16). Sur la base de l’innocuité et de l’efficacité du traitement, Goeckerman est une excellente méthode de traitement pour tout patient présentant un psoriasis modéré à sévère, un eczéma ou toute autre  affection cutanée prurigineuse et/ou inflammatoire s sévère.

Déclaration :

Le Dr Koo est un conférencier pour Abbott, Leo et Stiefel-GSK. Il mène des recherches pour Amgen, Janssen, Novartis, Photomedex, Galderma et Pfizer. Le Dr Koo n’a pas d’actions, placements ou membre faisant partie d’une compagnie pharmaceutique. Aucun conflit d’intérêt n’a été divulgué.

Remerciements :

Nous tenons à remercier le personnel de l’UCSF Psoriasis et le Centre de Traitement de la Peau pour leur travail, en particulier notre coordonnateur Goeckerman, Sarah Hulse R.N.

Références :

  1. Parisi R, Symmons DP, Griffiths CE, Ashcroft DM. Global Epidemiology of Psoriasis: A Systematic Review of Incidence and Prevalence.The Journal of Investigative Dermatology.
  2. H GW. The treatment of psoriasis.Northwest Med. 1925;24:229–230.
  3. Koo J, Lebwohl M. Duration of remission of psoriasis therapies.Journal of the American Academy of Dermatology. 1999;41:51–59.
  4. Menter A, Cram DL. The Goeckerman regimen in two psoriasis day care centers.Journal of the American Academy of Dermatology. 1983;9:59–65.
  5. Lee E, Koo J. Modern modified ‘ultra’ Goeckerman therapy: a PASI assessment of a very effective therapy for psoriasis resistant to both prebiologic and biologic therapies.The Journal of Dermatological Treatment.2005;16:102–107.
  6. Kim IH, West CE, Kwatra SG, Feldman SR, O’Neill JL. Comparative efficacy of biologics in psoriasis: a review.American journal of clinical dermatology. 2012;13:365–374.
  7. Serrao R, Davis MD. Goeckerman treatment for remission of psoriasis refractory to biologic therapy.Journal of the American Academy of Dermatology.2009;60:348–349.
  8. Chern E, et al. Positive effect of modified Goeckerman regimen on quality of life and psychosocial distress in moderate and severe psoriasis.Acta Dermato-venereologica. 2011;91:447–451.
  9. Dennis M, Bhutani T, Koo J, Liao W. Goeckerman therapy for the treatment of eczema: a practical guide and review of efficacy.The Journal of Dermatological Treatment.
  10. Papp KA, et al. Biologic therapy in psoriasis: perspectives on associated risks and patient management.Journal of Cutaneous Medicine and Surgery.2012;16:153–168.
  11. Menter A, et al. Guidelines of care for the management of psoriasis and psoriatic arthritis: Section 5. Guidelines of care for the treatment of psoriasis with phototherapy and photochemotherapy.Journal of the American Academy of Dermatology. 2010;62:114–135.
  12. de Miguel R, el-Azhary R. Efficacy, safety, and cost of Goeckerman therapy compared with biologics in the treatment of moderate to severe psoriasis.International Journal of Dermatology. 2009;48:653–658.
  13. Busse K, Koo J. Introducing the delayed retinoid burn: a case report and discussion of this potential risk of retinoid-phototherapy combination management.Journal of the American Academy of Dermatology.2011;64:1011–1012.
  14. Maughan WZ, Muller SA, Perry HO, Pittelkow MR, O’Brien PC. Incidence of skin cancers in patients with atopic dermatitis treated with ocal tar. A 25-year follow-up study.Journal of the American Academy of Dermatology. 1980;3:612–615.
  15. Pittelkow MR, Perry HO, Muller SA, Maughan WZ, O’Brien PC. Skin cancer in patients with psoriasis treated with coal tar. A 25-year follow-up study.Archives of Dermatology. 1981;117:465–468.
  16. Roelofzen JH, et al. No increased risk of cancer after coal tar treatment in patients with psoriasis or eczema.The Journal of Investigative Dermatology.2010;130:953–961.