L’étude de suivi de 25 ans (réalisée en 1981)

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Incidence des cancers de la peau chez les patients atteints de dermatite atopique, traités avec goudron de houille

Willard Z. Maughan, M.D., Sigfrid A. Muller, M.D., Harold O. Perry, M.D., Mark R. Pittelkow, M.D. et Peter C. O’Brien, Ph.D.

Rochester, MN

Les onguents de goudron de houille ont été utilisés pendant de nombreuses années pour le traitement de la dermatite eczémateuse chronique. L’éventuel effet cancérogène de l’onguent de goudron de houille et de la lumière ultraviolette (le méthode Goeckerman), considérés individuellement ou en association, a été d’inquiétude chez médecins. Une étude de suivi de 25 ans sur 426 patients atteints de dermatite atopique et de neurodermite, hospitalisés et traités avec des onguents de goudron de houille et de la lumière ultraviolette dans la Clinique Mayo de 1950 à 1954, a été effectuée en 1981. Ces résultats ont été comparés à ceux d’une étude similaire sur des patients atteints de psoriasis qui également avaient été traités avec des onguents de goudron de houille et de la lumière ultraviolette. Les résultats de cette étude suggèrent que l’incidence du cancer de la peau n’est pas augmenté au-dessus de l’incidence attendue pour certaines populations des États-Unis. La présente étude rassure sur le risque de cancer de la peau relativement faible chez les patients atteints de dermatite atopique et de névrodermite, traités avec les onguents de goudron de houille et la lumière ultraviolette (la méthode Goeckerman). (J Am Acad Dermatol 3:612-615, 1980.)

Les onguents de goudron de houille ont été utilisés pendant plusieurs décennies pour le traitement des différents dermatoses, surtout de la dermatite eczémateuse chronique et du psoriasis. Depuis la fin des années 1920, les dermatologues à notre institution ont utilisé le goudron de houille brut de 1% à 5 % (principalement dans la vaseline) et de la lumière ultraviolette, connu comme le  méthode  Goeckerman, dans le traitement des patients atteints de dermatite atopique et de psoriasis. Cette forme de thérapie a été de grande efficacité, et la fréquence et la sévérité des effets secondaires ont été mineurs. Goudron de houille peut posséder des propriétés cancérigènes, les ouvriers dans l’industrie du goudron de houille ont le risque accru de développer des tumeurs maligns 1-3,en particulier de non-mélanome cancers de la peau. Cependant, très peu des cas signalés des cancers ont été attribuées à l’usage dermatologique de goudron de houille.

Le Département de dermatologie et la Section des statistiques et recherche médicale, la clinique Mayo et Mayo Foundation.

Demandes de réimpression à : Dr W. Z. Maughan, c/o de la Section des Publications, Mayo Clinic, 200 First St. SW, Rochester, MN 55901

Aussi, les dermatologues pratiquant cette forme de thérapie à la clinique Mayo, y compris Goeckerman, O’Leary, Brunsting et Kierland, ainsi que le personnel présent, n’ont pas été au courant du risque accru du développement de cancers cutanés chez ces patients traités. Néanmoins, car cette expérience était considéré comme anecdotique, une étude de suivi formelle a été organisée. Nous rapportons notre expérience du traitement des patients qui ont eu la névrodermite et dermatite atopique parce que il a été suggéré que les patients psoriasiques peuvent être plus résistants à l’élaboration du cancer de la peau.

Tableau I. Sites de tumeurs cutanées chez les patients traités avec le méthode de Goeckerman *

Site Type de tumeur Total
 Basocellulaire Spinocellulaire Inconnu
Tête et cou 7 (88%) 1 (100%) 2 (100 %) 10 (91%)
Membres supérieurs 0 0 0 0
Tronc 1 (12%) 0 0 1 (9 %)
Extrémités inférieures 0 0 0 0
Inconnu 0 0 0 0
Total 8(100%) 1 (100%) 2 (100 %) 11 (100 %)
* En pourcentage du type de tumeur total.

Nos résultats chez les patients psoriasiques ont été déclarés séparatement..4

MÉTHODES ET MATÉRIAUX

Tous les patients atteints de dermatite atopique ou de neurodermatite diagnostiqué à la Mayo Clinique de 1950 à 1954 ont été identifiés. Les dossiers ont été examinés pour déterminer le nombre de patients ayant reçu le traitement Goeckerman dans un programme supervisé hospitalisé. Au totale 426 patients avait été traité ainsi. Le dossier de chaque patient ayant reçu le traitement de Goeckerman a été extraite pour établir le type, la quantité et la durée d’utilisation des médicaments de goudron de houille. De 426 patients, 305 (72 %) ont étaient trouvés et contacté par téléphone ou ont remplis le questionnaire de suivi afin de déterminer si une tumeur maligne de la peau ou d’autres cancers avait développé depuis le traitement initial. Le questionnaire, similaire à celui utilisé dans une étude parallèle des patients psoriasiques4, demandait les informations  quant à l’état présent des dermatoses, le santé générale, les traitements dermatologiques utilisés (y compris les rayons x, l’arsenic et leur utilisation de produits de goudron de houille), le lieux où ils habitaient, le type d’occupation et l’exposition au soleil. Si le patient était décède, certificats de décès ont été demandés, et ceux-ci ont été obtenus sauf dans cinq cas.

Dans le calcul du nombre de personnes chez qui les cancers de la peau étaient censés a développer, les données de la Troisième Etude Nationale de Cancer ont été utilisées. L’évaluation statistique était identique à celui effectué dans l’étude sur psoriasis.  L’indicateur de personnes-années à risque a été calculée pour chaque intervalle de 5 ans séparément pour chaque sexe. Autrement dit, pour chaque personne dans l’étude, le nombre d’années de suivi, au cours de lequel la personne était dans une certaine période de 5 ans a été calculé. Cette valeur a été résumée pour tous les patients, et le total des années-personnes à risque au cours de l’intervalle a été obtenu. Ce total a été multiplié par les taux d’incidence annuel selon l’âge et le sexe indiqué pour chacune des différentes régions de l’étude.

Le nombre de personnes dans notre étude qui auraient pu s’attendre à avoir développé  non mélanome cancers de la peau si ils avaient vécu dans chacune des régions signalées dans la Troisième Enquête nationale du Cancer sont 18,8 pour Dallas-Fort Worth, 9,4 pour San Francisco-Oakland, 6,7 pour Minneapolis-St. Paul et 5.3 pour l’Iowa. Onze patients avaient développé des cancers de la peau sans mélanome. Par conséquent, aucune augmentation significative de l’incidence du cancer de la peau a été vu dans notre population de patients en comparaison avec la présence de cancer de la peau attendue, si notre population avait été domicilié dans la région de Dallas-Fort Worth.

Tumeurs malignes non cancéreuses cutanées ont également été observés. Huit cancers non cutanés ont été signalés (tableau II).

Les données de la Troisième Enquête Nationale de Cancer pour le ratio des non-mélanome cancers de la peau  contre tous les cancers, à l’exclusion des non-mélanome cancers de la peau sont variée d’un maximum de 1,16 (Dallas – Fort Worth) à un minimum de 0,42 (Iowa). Dans la présente étude, dix patients ont signalé une malignité autre que le carcinome cutané. Le ratio de 1.1 est similaire à celle de la région de Dallas-Fort Worth. Par conséquent, aucune aberration apparente du ratio a été observée.

DISCUSSION

Le nombre de patients atteints de dermatite atopique qui ont développé le cancer de la peau  a été comparé avec les valeurs prévues d’occurrence calculé à partir des données de la Troisième Enquête Nationale de Cancer pour le cancer de la peau sans mélanome. L’incidence dans notre étude était inférieure à celle pour le région de Dallas-Fort Worth et un peu plus importante que celui de San Francisco ou Minneapolis-St. Paul.

Ce qui donne le nombre approximatif des personnes dans ce groupe pour lequel le cancer de la peau nouvellement diagnostiqués  devrait développer. Tous les combinaisons d’âges et de sexes différent ont été additionnes pour obtenir le nombre total de personnes censées a développer le cancer de la peau dans notre groupe de patients. Ces chiffres attendus sont des valeurs approximatives.

RÉSULTATS

Entre 305 patients sous le suivi adéquat, treize ont indiqué que le cancer de la peau s’était développé après le traitement Goeckerman initial. Huit patients avaient des carcinomes basocellulaires, L’un avait un carcinome malpighien, deux avaient une variété inconnue de tumeur malin de la peau, et deux avaient les mélanomes malins.

Les spécimens des biopsies des cancers de la peau sans mélanome ont été obtenus chez neuf patients. Pour deux cas, les médecins qui ont soigné les malades n’ont pas pu être contacté, et les patients n’avaient pas les diapositives dans leur disposition. Ces cas sont considérés comme des cancers de la peau présumée.

Sept des huit carcinomes basocellulaires étaient situées sur la tête et le cou, tout comme le carcinome spinocellulaire et les deux cancers de la peau non identifiés. Au total, dix des onze cancers de la peau sans mélanome ont été localisés sur les zones exposées au soleil (tableau I).

Le rapport entre les carcinomes basocellulaires et les carcinomes épidermoïdes était  8:1. Ce ratio est similaire à celui rapporté dans la Troisième Enquête Nationale du Cancer. Le ratio des cancers basocellulaires à des carcinomes malpighiens était 6:1 pour Minneapolis-St. Paul, 5:1 pour San Francisco-Oakland et 3:1 pour Dallas-Fort Worth et pour l’Iowa.

Puisque nos patients étaient un groupe varié sur le plan géographique, il ne semble pas d’y être aucune augmentation significative des chiffres d’incidence signalée.

Le ratio des carcinomes basocellulaires contre les carcinomes épidermoïdes était 8:1, c’est-à-dire un taux comparable a celui rapporté par Scotto et al..3 Dans une étude de suivi des patients psoriasiques traités par PUVA, le nombre légèrement accru de non-mélanome cancers ont été signalés, mais il y avait moins carcinomes basocellulaires que carcinomes spinocellulaires. Beaucoup de nos patients vivaient dans des régions du sud des États-Unis, et quelques-uns avaient des professions qui nécessitait d’être exposé au soleil. Des onze patients atteints de cancers de la peau sans mélanome, huit avaient reçus une thérapie aux rayons x pour la dermatite atopique. Certains d’entre eux avaient reçus entre trente et quarante traitements, mais le plupart ne se rappelaient pas du nombre de traitements ou de la dose reçue. Au moment du traitement  Goecherman dans la Mayo Clinique, les patients étaient âgés de 1 an à la fin de l’âge adulte. L’âge moyen de cette population était inférieure à celui de l’étude sur le psoriasis. Le suivi de ce groupe était plus difficile que celui du groupe des patients atteints de psoriasis. Même avec ces difficultés, cependant, nous avons trouvé et obtenu les informations de suivi sur 72% des patients. Il n’y avait aucunes caractéristiques d’identification spéciales pour les patients non tracées.

Il y avait huit patients atteints de cancers non cutanés, ce qui ne semble pas sensiblement diffèrent  des valeurs rapportées ailleurs.

D’un intérêt considérable étaient les deux patients atteints de mélanome malin présumé, mais les lames de leurs lésions n’ont pas pu être obtenus : l’un des deux était une femme avec une lésion sur l’extrémité inférieure, tandis que l’autre était un homme avec une lésion sur la lèvre. Le petit nombre de patients dans notre étude ne permet pas faire une déduction  statistique dans ce dernier cas, mais la lumière ultraviolette a été considérée comme un stimulus environnemental  qui avait pu être la raison important du développement du mélanome malin. Des 280 patients suivis dans l’étude sur le psoriasis, l’un a développé un mélanome malin. L’utilisation des produits de goudron de houille après le renvoi de la Mayo Clinique variait grandement chez les patients de non-utilistion à l’utilisation quotidienne pendant 26 ans.

Les patients chez lesquels les tumeurs malins de la peau s’étaient développé avaient utilisé des dérivés du goudron de houille pour des durées variables du temps — de zéro après la sortie de l’hôpital à plus de 50 jours par un an pendant 8 ans, habituellement avec du goudron de houille brut en pommade ou la liquide des détergents carboniques.  Sept patients avec les cancers de la peu développés  n’avaient jamais utilisé de dérivés du goudron de houille après le traitement Goeckerman dans la clinique Mayo, l’un des patients les a utilisé pendant 2 ans, l’autre – pendant 4 ans, le troisième – pendant  8 ans, et encore un était décédé et nous n’avons pas pu déterminer la fréquence de l’utilisation. Cent-soixante-cinq patients sans cancers de la peau avaient utilisé les produits de goudron de houille sur eux-mêmes pendant des périodes de temps diverses après avoir quitté l’hôpital, généralement avec la fréquence que nous considérerions  modérée.

Les patients chez qui les cancers de la peau s’étaient développés n’avaient pas reçu plus  de produits de goudron pendant leurs hospitalisation que ceux sans cancers de la peau; ils n’avaient pas été hospitalisés plus fréquemment. Ils n’avaient pas reçu plus de goudron de houille  que les autres, et beaucoup en avaient reçu moins.

Le seul autre suivi à long terme des patients atteints de dermatite atopique pour le développement du cancer était celle de Kaaber 7 qui avait interrogé 326 patients atteints de dermatite atopique tant pendant 42 ans et avait noté l’incidence du cancer similaire à celle entre la population générale. Notre étude rassure à certain niveau sur le fait que l’utilisation clinique des produits de goudron de houille n’a pas significativement modifié la fréquence des tumeurs par rapport a l’évolution naturelle

RÉFÉRENCES

1.    Pott P: Chirurgical observations relative to the cataract, the polypus of the  nose, the cancer of the scrotum, the different kinds of ruptures, and  the mortification of the toes and feet. London, 1775, L Hawes, W Clarke, R Collins.Londres, 1775, L Hawes, W Clarke, R Collins.

2.     Sladden AF : Pitch cancer. Report of the International t Conference on Cancer.Le rapport de la Conférence internationale de sur le Cancer. Bristol, 1928, John Wright &

Sons, p. 284-288.

3.     Gotz H: Tar keratosis, in Andrade R, Gumport SL, Pop- kin GL, et al, editors: Cancer of the skin: Biology- diagnosis-management, vol. 1. Philadelphia, 1976, W. B. Saunders Co., pp. 492-523.

4.     Pittelkow MR, Perry HO, Muller SA, et al: Incidence of skin cancers in psoriatic patients treated with coal tar: A 25-year follow-up study. (Submitted for publication.)

5.     Scotto J, Kopf AW, Urbach F: Non-melanoma skin cancer among Caucasians in four areas of the United States. Cancer 34:1333-1338, 1974.

6.     Stem RS, Thibodeau LA, Kleinerman RA, et al: Risk of cutaneous carcinoma in patients treated with oral methox- salen photochemotherapy for psoriasis. N Engl J Med 300:809-813,1979..

Kaaber K: Occurrence of malignant neoplasms in patients with atopic dermatitis. Acta Derm Venereol (Stockh) 56:445-447, 1976